Louis Blettery (1867-1951)
Louis Félix
Blettery naquit le 20 avril 1867 à Saint-Etienne (Loire).
L’un des témoins présent à
la rédaction de l’acte de naissance, Louis
Burghshtaler dut être le parrain du petit enfant.
Ses parents, Félix Fulgence Blettery et Charlotte Chenevier,
négociants en rubans élastiques
étaient installés au 7, place Marengo, entre la
préfecture et l’Hotel de Ville.
Louis Félix gardait quelques souvenirs de ses
premières années passées à
Saint-Etienne. Il racontait que tout petit, sa bonne
l’amenait jouer au square juste en face de la boutique tenue
par ses parents et que parfois il cachait dans la terre des soldats et
autres petits jouets et qu’ il était bien
étonné de ne plus les retrouver en revenant le
lendemain.
En 1870, la guerre éclata entre la Prusse et la France.
Sedan tomba en août et dès les premiers jours de
septembre la ville de Saint-Etienne mobilisa tous les hommes valides,
de crainte de voir arriver les prussiens. La place Marengo servit de
point de ralliement aux volontaires et Louis Félix se
souvenait avoir vu son père, revêtu de
l’uniforme des Gardes-Nationale partir en campagne.
Le 6 janvier 1871 naquit un petit frère à Louis
Félix. Celui-ci fut prénommé Jean Paul
Charles, mais il ne vécut que quelques temps et mourut, au
grand désespoir de ses parents en novembre 1873 de la
maladie de croup.
Louis Félix ne dut rester à Saint Etienne que
jusqu’en 1874. C’est en effet à cette
époque que ses parents achetèrent la belle maison
située à Saint-Vincent de Rheins,
dénommée “le Chateau de la
Lièvre”.
Toute la famille s’y installa donc dans le courant de
l’année 1875. Une autre vie commençait
pour Louis Félix.
Saint-Vincent de Rheins est situé dans le haut-Beaujolais.
Pays de moyennes montagnes, les hivers y sont parfois bien rudes.
Grand-Père racontait qu’il
n’était pas dans les habitudes de chauffer la
maison et que certaines années, par grand froid, les vins
entreposés dans les caves gelaient.
La propriété était composée
d’une grosse maison bourgeoise de forme rectangulaire,
couverte d’un toit à quatre pans à la
française, de plusieurs bâtiments pour
l’exploitation agricole et de vastes prés et
terres boisées aux alentours.
Il eut une enfance heureuse et fut gâté par ses
parents qui ont vu en lui l’héritier de la
famille. Très jeune encore, il reçut lors
d’un de ses anniversaires un fusil de chasse
spécialement confectionné pour lui à
sa taille. Cette arme lui servit réellement et il
exerça ses talents de tireur sur toutes les bêtes
à plumes et à poil qui passaient.
C’était la cuisinière qui en
était punie, obligée qu’elle
était de dépouiller et de plumer le gibier.
Il fut mis en pension de 1880 à 1882 au collège
“Jean Puy” de Roanne, certainement l’un
des meilleurs de la région. Cet établissement,
fondé par les Jésuites au XVII°
siècle, gardait encore lorsque Grand-Père y
était, le caractère strict de cet ordre
religieux.
Il dut
recevoir une éducation soignée et bien
sûr, il étudia le latin. A cette occasion, il
racontait qu’au cours d’une traduction
d’un texte en latin relatant le martyr d’un saint
homme, un élève traduisit ce texte au tableau de
la façon suivante “et il eut le coul
tranché”. Le professeur faisant remarquer que le
mot français pour “collum” ne
s’écrivait pas ainsi mais qu’il y avait
une lettre de trop, l’élève enleva le
“O” de “coul”, à la
grande hilarité des autres potaches.
A la distribution des prix, qui eut lieu le 3 août 1882
devant les plus hautes personnalités de Roanne, il
reçut plusieurs prix dont le premier pour le dessin
artistique. Cette cérémonie fut
endeuillée par un accident qui était survenu la
semaine précédante : un jeune
élève du nom de Fusy se tua en voulant
s’emparer d’un nid sur un tilleul de la terrasse du
collège. Une branche cassa et l’enfant fit une
chute de plus de huit mètres.
Les qualités artistiques de Grand-Père le
poussèrent vers la photographie, art qui était en
plein développement à cette époque et
vers 1887/1888, il reçu du matériel qui lui
permis de prendre de nombreuses vues des paysages et des gens de la
région.
Il photographia le château de la Lièvre
à Saint-Vincent de Rheins et l’une de ces photos
lui a peut-être servi à peindre le tableau
daté de 1890 qui représente cette maison vue de
la route de Thizy.
Saint-Vincent de Rheins vers 1885 au premier plan Louis Blettery
D’autres photos prises à la même
époque représentent des machines imposantes,
créees par Manfred Massabiaux, qui était devenu
son beau-frère en épousant Jeanne Blettery en
décembre 1881. (voir
photographies à Amplepuis)
Il
dessinait donc fort bien et peignait correctement. Outre la peinture du
château de la Lievre, il fit plusieurs aquarelles dont
“Garches au mois d’avril”
De 1888/1891 il fit son service militaire. La tradition raconte
qu’étant bon cavalier il voulut, au moment de son
incorporation, entrer dans un corps à cheval.
Impatienté par plusieurs heures d’attente dans la
caserne, il manisfesta sa mauvaise humeur. Voyant cela,
l’adjudant interpellé fit venir
“d’Artagnan”. L’animal devait
être particulièrement rétif. Le
cavalier et le cheval, chacun de son côté,
devaient défendre sa réputation. C’est,
semble t-il le cheval qui gagna ce qui explique que
Grand-Père accomplit ses devoirs militaires dans les
chasseurs alpins.
Le registre matricule établi à son nom le
décrit physiquement ainsi :
“Cheveux et sourcils châtains, yeux roux, front
découvert, nez et bouche moyenne, menton “rond,
visage ovale, taille 1 m 65, instruction : niveau 4. “
(Pour les services de l’armée, il y a 5 niveaux,
le cinquième étant le plus
élevé)
La
tradition familiale le disait également très
robuste et grand marcheur.
Une fois à la caserne, il refusa encore de
s’incliner. Plus tard, il raconta à Cousine ceci
“J’ai dit à mon père : je ne
resterai pas dans ce régiment, je déserterai ;
arrange toi avec Burleau pour me faire muter”. Ce Burleau
devait être un personnage important à
l’époque et ami de Félix.
Son père accepta de s’entremettre et
c’est ainsi que Louis arriva au service
géographique des Armées à Paris,
où le service était très
agréable.
Il se trouva pendant un temps sous les ordres d’un officier
du nom de La Rochelambert et officiellement, il termina son service
à Besançon dans les bureaux militaires.
Libéré de ses obligations militaires Louis
Félix Blettery revint à Saint-Vincent en 1891.
Alors, son père qui voulait qu’il continua le
métier que lui même avait
exerçé avec tant de succès, acheta
à Louis une voiture pour qu’il fasse sa
tournée de représentant en lui disant
“partout où tu diras de qui tu es le fils, tu
seras bien reçu”. Mais rapidement, Louis revint
à la maison après avoir vendu voiture et cheval.
Après cet incident, il ne dût pas rester
très longtemps à Saint-Vincent, et lui qui
rèvait de Paris où il voulait devenir peintre,
vint s’y installer en 1892.