1731 - Epidémie à Anost (Saône et Loire)
L’an 1731 à Gana en Auvergne il arriva une maladie aux bêtes à corne
dessus des jous et à côté de la langue par une vessie qui a son
commancement par paroît blanche son progres rouge et enfin presque
noire le tout en vingt quatre heures que si on y avoit pas remedié
pendant cette intervalle la vessie se crevoit et faisoit un ulsaire qui
coupoit la langue de la bête malade et tomboit morte et ce qui est le
plus surprenant c’est que cette maladie ne se manifestoit par aucun
symptome qui parust l’animal beuvant, mangeant et travaillant à son
ordinaire jusqu’à ce que la langue luy fut tombée.
De cette sorte qu’il en perit un grand nombre mais comme en moins d’un
jour et demie tous les villages des environs de Gana distant de pres de
deux lieux furent infestés sans qu’il y eust aucunes communications des
bestiaux d’u lieu à un autre. Après une serieuse reflection ayant
reconnu cette maladie on apporta un grand soin de visiter tout le
betail trois fois le jour pour remarquer quand la vessie commencoit à
prendre une couleur noire pour avec une cuillere d’argent ou une pièce
d’argent l’on crevoit autant de vessie qui paroissoit un peu noire qui
etoit le temps de sa maturité; que s’il y en avoit plusieurs autres
vessies l’on attendoit à les crever qu’elle eussent cette noirceur de
telle sorte qu’il a fallu reiterer plusieurs fois la même chose à
un même animal etant donc crevée et ratis et avec la cuillere jusqu’au
sang l’on lavoit bien la playe avec de l’eau de fontaine et tenant la
tête baissée de la bête malade pour luy faire sortir dehors l’ordure
qui en etoit sortit et l’eau dont on lavoit lavé crainte qu’elle n’en
avala l’on la lavoit encore avec du bon vinaigre ou on mettoit du sel
pilé; du poivre et de l’ail et des herbes fortes le tout concassé. Cela
fait l’on frottoit la playe dont on avoit oté la peau avec une pierre
de vitriol de Chypre l’appliquant jusqu’à 3 fois sur toute la playe
apres quoy l’on couvroit la playe avec du sel cerusé bien fin crainte
que la bête ne fut pas entierement guerie du 1° remede on les
appliquoit le même remede jusqu’à entiere guerison il falloit aussy ce
qui a été observé particulierement en Bourgogne et notamment à Anost et
dans plusieurs autres lieux et par ce moyen on a point ouy dire qu’il
en soit perit depuis cette maladie en moins de rien se repandoit dans
tous les environs. Coulon, prieur d’Anost