Commentaire du curé de Cerdon (Ain) - registre paroissial, fin 1694


Je laisse aux historiens de parler des guerres que la désunion entre les princes de l’Europe a allumé dans ce temps, en Piemont, en catalogne, en Allemagne, en Flandres, en Angleterre et ailleurs, en nos pais aussi en ceste seule paroisse où par les fievres malignes et les maladies populaires, les registres de mortuaires sont remplis,

Tous les royaumes cy dessus se sont veu enveloppé dans un mal général jusqu’à voir en des paroisses ou les deux tiers mouroient de misere ou de maladie en celle cy tant par les sepultures cy devant que par celles qui ont esté faites de plusieurs grands esprits qui estoient allés ailleurs chercher leur pain que par ceux qui se jetterent dans des troupes, la paroisse s’est diminuée ceste année du tiers ou environ
 
La cherté des vivres qui ........... faisait gemir les plus cruels, le froment s’est vendu jusques à sept livres tournois la bicheté .................... six livres , l’orge quattre livres dix sols et l’avoine trente six à quarante sols. Le prix du vin estoit à vingt cinq livres et plus et aux vendenges de l’année precedentes, Monsieur Desoches, curé de St Alba l’a vendu à raison d’un louis d’or vallant douze livres et dix sols le barrel, touttes denrées estoient en un si excessif prix qu’on peut bien dire avec le prophete ........................... et ceste cherté étoit generalle, le pain blanc c’est vendu jusques à sept sols la livre,

Et par un soing miraculeux de la providence eternelle la recolte a esté si abondantes en grains que le froment s’est donné à dix huit, vingt, vingt quatre sols de ceste mesme année et autres grains à proportion.

Nous avons eu ceste mesme année le passage de quantité de troupes dont la pluspart alloient en Piemont entre autres douze compagnie de gendarmes

Chacun estoit sur le point d’abandonner ses biens et .............. d’un autre passage. Cependant il n’y a eu que les estapiers qui en ayent souffert. Ils furent si vivement touché à la veue de la pluspart des habitans qui portoient la mine de déterrés soit comme cadavre longtemps esposé au soleil ne vivant que d’herbage sans assaisonnement qu’ils cueillaient dans les prés ou les gendarmes les ayant veu reduits à ceste necessité s’arrachant le pain et la viande pour les secourir privoient leurs chevaux de la ration de grains ordinaires pour la leur donner et en voyant non seulement  les enfans ................... toutte sorte d’aage recueillir les grains d’avoine qui tomboient de la bouche des chevaux aller dans les champs ensemencés de fouir et recueillir les grains déjà germés et les manger dans cest estat,

Je laisse à ...........  si les nippes, les habits et joyaulx et les meubles furent vendus et si les héritages immobiliaires estoient esposé en vente. Dieu par sa bonté éloigne de nous ces sortes de miseres