Commune de Neuville


Articles parus dans le Journal de l’Aisne :

n° 301 du samedi 29 décembre 1900 Variétés - Etudes locales
n° 302 du dimanche 30 et lundi 31 décembre 1900
n° 2 du mercredi 2 et jeudi 3 janvier 1901 (4)
n° 3 vendredi 4 janvier 1901 - (suite n° 5).
n° 4 du samedi 5 janvier 1901 (suite n°6)
n° 6 du lundi 7 et mardi 8 janvier 1901 Etudes locales suite n° 7
n° 8 du 10 janvier 1901


Château de la NeuvilleNoms anciens d'après Matton.
1150- Nova villa
1152- Noville
1249- Nova villa in Laudunesio
1260- Novilla in Laudunesion
1261- Nueveville en Lonois
1267- Neuvilla
13ème siècle Nueveville en Lonois
1359- Nuefville en Lannois
1394- Nuefville en Laonnois et Lannoys
1496- Noeufville en Lannois
1504- Nevefville
1536- Neufville en Launois
1624- Neufville en Launnoy
1630- Neufville
1668- Neufville Saint Julien

Rivières, montagnes, cours d’eau.

La colline improprement appelée montagne, qui se trouve au Nord du village, s'étend de l'Ouest à l’Est et contribue à former au Sud le bassin de l'Ailette et au Nord celui de la rivière de Bièvres. Son élévation au-dessus des marais formés par ces deux cours d'eau est de cent mètres. Son plateau est sensiblement incliné sur le Nord et ses versants S. et N. forment plusieurs échancrures qui donnent à la colline, à ces endroits, l'accès très difficile. Au lieu-dit Les Plantes, la colline se prolonge vers le S. et devient tellement étroite en dessous du moulin de Chermizy qu'elle mesure à peine six mètres. Puis, s'élevant un peu, elle s'élargit en descendant vers le bois d’Ouï, où elle se termine à environ 400 mètres de la rivière.

1ère section - 13 lieux-dits

1- le Bois des Allemonts,
2- les Coqueraux (Noisetiers),
3- le Chemin de Laon,
4- le Savant,
5- la Pièce des Carrières,
6- Au-dessous des Creuttes,
7- Derrière la Ville,
8- la Garenne,
9- l'Allée
10- le Bois Jacques Chenu,
11- les Plantes,
12- la Fourcière,
13- le Chemin de Chermizy

2ème section - 9 lieux dits

1- le Chemin de Chamouille,
2- le Clos,
3- le Bois de la Croix,
4- la Fontaine Noé,
5- les Prés de la Tuilerie,
6- la Maison Doulet,
7- les Charmies
8- les Fortes Terres,
9- les Essillons.

Maison isolée

Un ancien moulin à vent, démoli à environ 1.200 mètres au N.0. au village, portait le nom de Moulin Colard.

Grottes anciennement habitées.

Il n’y a dans la commune aucune pierre ni roche méritant une mention, mais il existe de nombreuses grottes visitées par des savants qui les ont décrites dans leurs ouvrages.

Nous reproduisons les descriptions qu'en faites M. Fleury. Excursion à Neuville, Comin et Passy

La station des grottes de Neuville n’est pas unitaire il y a un village de Crouttes regardant le midi et un second tourne vers le nord. Les deux stations sont séparées par un étroit plateau. Le premier village serait encore intact et solide, si l'homme moderne ne le modifiait par son travail et pour ses besoins. Le second s'effondre lentement depuis longtemps et sans temps d’arrêt dans la destruction. Le premier s’étale au grand air et au plein soleil ; le second disparait absolument sous l'ombrage épais des bois qui montent jusqu'à la Crête de la montagne.

Les creuttes de Neuville du midi comptent quelques specimens de la grotte primitive : entrée de tanière étroite, circulaire ou affectant la forme ogivale ; une chambre ou deux, rarement trois, basses, peu profondes, toujours pourvues de l’alcôve, du lit du banc de l'armoire et des nombreux trous taillés dans la roche tendre. Beaucoup de creuttes n'ont ni fenêtres, ni cheminées, la lumière et l'air n'y arrivent que par le trou qui sert de porte. Quelques unes à l'extrémité ouest du groupe et voisines d'une ferme aujourd’hui abandonnée, ont été réparées et remaniées pour emmagasiner des récoltes, des voitures et y rentrer des bestiaux. Certaines taillées dans un milieu trop friable sont renversées et bouchées. La plateforme caractéristique et produite par le résultat de la famille antique, s'étend bien apparente devant tout le groupe qui aujourd'hui ne contient plus qu'une trentaine d'habitations souterraines. Dans deux d'entre elles sont des puits ou excavations qui ne peuvent avoir servi que pour la recherche de l'eau, puisque le calcaire repose sur une couche sablonneuse d'une puissance de 60 m et plus. Ce sont peut-être des silos, des cachettes où la fouille produirait probablement quelques résultats intéressants. Ces puits sont aujourd’hui remplis de grosses pierres.

L'accès du second groupe de Neuville, celui au Nord est extrêmement pénible, sur des pentes rapides, boisées, garnies de plantes encombrantes, de ronces et de buissons épineux. Le tout est cahot, désordre, chute de blocs énormes, entassements de pierres et de terres habillées de mousses épaisses, et de pariétaires. Il n'y manque même pas le danger, car les plafonds sont ouverts ou lézardés. La blancheur de certaines pierres indique qu'elles viennent de tomber récemment.

Une des grottes est un repaire d’innombrables chauves-souris qui s’enfuient en criant et frappant de l'aile le visage des visiteurs. C'est sauvage et perdu. Une des creuttes est une véritable caverne à compartiments multiples, à galeries s’enfonçant lentement et se croisant sous terre, compartiments enchevêtrés a ce point qu'on pourrait s'y perdre. Pour pénétrer jusqu'au fond de cette grotte exceptionnelle, il faut des flambeaux. Ici, la plate forme encombrée d'énormes blocs et de terre tombée du haut, peupIée d'arbres et de buissons serrés, se laisse seulement soupçonner. Dans les parois de la roche tendre, des trous voulus à usage de lits, de bancs et d'armoires.

En avant des groupes, une petite source, au-dessous un ravin profond et sauvage, utilisé en sentier dans le bois. Au pied de la montagne, la petite rivière de la Bièvre avec des marécages jadis infranchissables et qui bordent toute la montagne, sur la face du Nord, toujours l'alimentation et la défense.

La ville moderne de Neuville doit sa naissance évidemment à l'émigration vieille déjà de huit à neuf siècles des habitants du village souterrain du midi et peut-être aussi de celui du nord.

Chaussée gallo-romaine.

Une chaussée gauloise, dite de barbarie, traversait le territoire de Neuville sur un espace d'environ 800 mètres et elle se dirigeait du S. au N. venant de Cerny-en-Laonnoy et se dirigeait vers Martigny. Elle occupait l'emplacement du chemin actuel, séparant la commune de Chamouille de celle de Neuville appelée Chemin de Roucy et traversait la rivière de l'Ailette aux limites des trois territoires de Cerny, de Chamouille et de Neuville. Un propriétaire en construisant un pont en cet endroit a retrouvé de nombreux vestiges de cette voie. Un autre habitant de Cerny, en abattant un arbre poussé sur l'emplacement de ce chemin en 1882, a également constaté l'existence de cette voie gauloise. Pour déraciner l’arbre, il lui fallut découvrir une couche de pierres de plus de 50 à 60 cm d'épaisseur. Mais aucune d'elles ne portait d’inscription.
(Melleville, dans son Dictionnaire historique du département de l'Aisne, parle de cette chaussée gallo-romaine.)

La liste des personnages célèbres qui sont nés au château de Neuville, qui ont habité la commune ou qui y ont été inhumés est assez longue. Nous indiquerons seulement les plus célèbres, puisque nous donnons plus loin la liste complète des seigneurs de Neuville :

1- Simon de Neuville

Quatre ans avant sa mort arrivée en 1196, il donna à l'abbaye de Vauclerc où il devait sans doute être inhumé, une aumône et l'un de ses serfs nommé Albric d'Oulches, avec tous les biens en la possession de cet homme. Ce don se fit toutefois du consentement de ce dernier qui, en signe d'assentiment, se transporta dans l'Eglise de Vauclerc et mit sa main sur l'autel.

2- Alain de Neuville

Ce seigneur suivit Philippe Auguste en 1198. Lorsque ce prince alla faire la guerre aux Flamands révoltés, il fut fait prisonnier. Rendu quelque temps après à la liberté, il partit pour l'expédition dirigée contre les Albigeois et tua Don Pédre qui était venu à leur secours à la bataille de Muret près de Toulouse. Il fut tué en 1220 au siège du château de Montréal qui lui avait été donné en récompense de ses services.

3- Pierre de Neuville

Fit avec Saint Louis la Croisade en 1248, se distingua à la bataille de Mansourah, mais fut probablement tué dans la retraite en défendant le passage d'un petit pont aux côtés du comte de Soissons et du sire de Joinville qui combattaient avec lui. Bien qu'ils n'eussent avec eux que deux écuyers, ils allèrent résolument se placer en travers du petit pont.

Les Sarrasins ne tardèrent pas à les attaquer. Ils firent tomber sur eux une telle quantité de flèches que leurs boucliers et leurs chevaux en étaient tout hérissés. Le péril imminent où ils se trouvaient n’abattit point la gaieté du comte de Soissons qui s’écria en s’adressant au sire de Joinville “Sénéchal, laissons crier et braire cette chiennaille ; par la coiffe Dieu (c'était sa manière habituelle de jurer) encore parlerons-nous de cette journée en chambre, devant les dames.

Tandis que ces trois preux défendaient avec opiniatreté ce passage contre une foule d'ennemis, tout-à-coup un Sarrazin, qui s'était introduit par un autre point dans l'enceinte où ils se trouvaient, vint fondre sur eux par derrière et, en passant près du sire de Neuville, il lui déchargea un si violent coup de masse dans le dos que ce seigneur se coucha défaillant sur le cou de son cheval. Pierre de Neuville mourut-il du coup ? Nous l'ignorons car Joinville qui rapporte cet évènement ne dit pas qu'elles en furent les suites.

Il nous paraît bien certain toutefois que ce seigneur ne revint point en France, car ses deux frères, Alain et Gauthier, désirant sauver son âme, donnèrent trois muids de vin destinés à célébrer son anniversaire avec un autre muid pour acheter la cire nécessaire à cet office ; et de plus ils firent des aumônes aux pauvres dans le même dessein, en donnant dix livres parisis (près de 1100 francs d'aujourd’ui) pour être distribués aux nécessiteux de Neuville, vingt sous aux frères mineurs de Laon, dix sous (environ 50 francs) à l'hôpital de Sainte-Marie de cette ville, etc...

Au moment de son départ pour la croisade, Pierre de Neuville avait laissé en France une femme nommée Aélide ou Adélaïde de Beaumetz (de Belle Manso) et un jeune enfant du nom d'Alain. L'un et l'autre étaient morts sans doute en 1260 puisqu'il n'est pas question d’eux dans la pièce précédente et que la seigneurie de Neuville se trouvait dès lors dans les mains d'Alain, frère puiné de Pierre.

Alain III parait aussi avoir pris une alliance dans la maison de Roucy. Sa femme se nommait Eustache comme sa mère et elle semble avoir été une seconde fille de Jean IX de Pierrepont, comte de Roucy ; mais nous ne voyons pas son nom figurer parmi ceux des enfants de ce seigneur dont la liste nous a été transmise par les généalogistes. Il paraît être mort vers 1277

A partir de cette époque, on éprouve de grandes difficultés pour continuer la liste des seigneurs de Neuville. Nous trouvons bien, cette même année 1277, un Pierre, chevalier de Neuville, faisant une donation de 60 sous parisis de rente à l'abbaye Saint-Vincent de Laon ; mais nous ignorons s'il fut seigneur de ce village ainsi que son fils du même nom que lui.

On voit ensuite figurer une Alix, dame de Neuville en 1297. Puis, il faut arriver à 1344 pour retrouver un autre seigneur de ce lieu. Celui-ci se nommait Henri.

Son nom se lit sur deux chartes des années 1344 et 1360 : l’une d’elles seulement mérite d’être mentionnée ici. C’est un acte par lequel ce seigneur reconnaît n’avoir aucun droit de chasse dans la forêt de Samoussy, appartenant aux moines de Saint-Martin de Laon (cartel de Saint-Martin de Laon).

La première et ancienne famille des sires de Neuville paraît s’être éteinte dans cet Henri Nous trouvons en effet que la seigneurie de ce village était passée, vers 1370, nous ne savons pas de quelle manière, dans les mains de Jean Lemercier, personnage qui joua un rôle considérable dans les affaires publiques du temps de Charles V et de Charles VI.

Jean Lemercier était Ecossais d'origine. Elevé à la cour par le roi Charles V, ce prince le prit en affection et lui voyant de la capacité dans les affaires, il le chargea de plusieurs missions délicates où il donna les preuves d’une grande habileté jointe à une activité peu commune.

De l'emploi de maître de la monnaie qu'il exerçait à Saint-Quentin en 1339, Charles V l'éleva à celui de son secrétaire particulier, puis il lui donna la charge de trésorier des guerres C'est en cette qualité que Jean Lemercier alla trouver le pape en Avignon en 1371 afin de solliciter de lui, pour le roi de France, l'aide d'un décime sur le clergé. Il obtint cet impôt qui fit entrer 100.000 livres dans les coffres de Charles V.

Ses services lui valurent d'abord la garde et le gouvernement du château de Creil, puis en 1380, à la mort de Charles V, il fut nommé avec le connétable de Clisson, les seigneurs de la Rivière et de Villaines, du conseil institué pour diriger les affaires au royaume pendant la minorité de Charles VI.

La faveur dont jouissait à la cour Jean Lemercier lui avait fait de nombreux et puissants ennemis à la tête desquels se faisaient remarquer les ducs de Berri et de Bourgogne, oncles du roi. Jean Lemercier ne l'ignorait pas et, dans la vue de se prémunir contre leurs mauvais desseins à son égard, il obtint du roi, en 1388, la permission de construire un château-fort à Fontenay-en-Brie, terre qu'il avait récemment achetée.

Jean Lemercier dit Juvenal des Ursins était un homme sage, prudent et d'une grande discretion Il eut presque seul le gouvernement des finances pendant la minorité de Charles VI et il sut mettre un tel ordre dans les recettes, une telle économie dans les dépenses qu'il fit, ajoute le même historien, “un bien grand trésor pour le Roy”

C'est ce qui devait le perdre. Quand Charles VI fut touché en démence, ce trésor devint le point de mire des oncles du roi. Un jour dans le palais, à Paris, c’était en 1395, et lui dit : “Seigneur de Noyant (Nouvion-le-Comte, de Fontenay-en Brie et autres lieux, il m'est survenu une nécessité pour laquelle me faut avoir présentement 30.000 écus ; faites-me les bailler du trésor de Monseigneur le Roy , les restitueray une autre fois”

Jean Lemercier s'excusa : il répondit au duc de Bourgogne qu'il n'était pas le maître, qu'il devait s'adresser au Conseil de régence et que si celui-ci lui ordonnait de délivrer cette somme, il le ferait volontiers.

Le duc de Bourgogne se répand en menaces contre lui : “Vous ne voulez pas me faire ce plaisir, lui dit-il, avec colère, je vous assure que en bref je vous destruiray”.

Il me tint que trop bien parole. Le roi étant tombé dans une rechute quelque temps après, il saisit cette occasion pour faire arrêter, d'accord avec ses autres frères, les ducs de Berri et d'Anjou, les conseillers de Charles VI au nombre desquels se trouvait Jean Lemercier. Celui-ci fut saisi chez lui le 29 septembre 1393 et enfermé au Louvre, mais on l'en tira bientôt pour l’envoyer à la Bastille Saint-Antoine, dont un enfant du pays, Jean de la Personne, vicomte d'Acy, près Soissons, était alors châtelain.

Le prévôt de Paris commença son procès. On forma contre lui, qui avait tout à perdre à la mort du Roi, l’absurde accusation d'avoir empoisonné Charles VI et d'être ainsi l'auteur de la maladie étrange contre laquelle échouait la sdence des médecins, une mort prochaine attendait ce vieux serviteur dont toutes les actions avaient eu pour but le service et les intérêts de l'Etat. Dans la prévision de cet évènement, ses bourreaux se faisaient un cruel plaisir de lui annoncer chaque jour que son supplice aurait lieu le lendemain.

Jean Lemercier, brisé par ces tortures morales et dont l'âge commençait à énerver et l’âme et le corps en conçut un violent chagrin qui se manifesta, par des larmes abondantes ; il pleura tant et si longtemps qu'il faillit en perdre la vue.

Heureusement pour Jean Lemercier comme pour ses compagnons d’infortune, une femme, un véritable ange, veillait sur eux. La sensible Jeanne de Bourgogne, épouse du duc de Berri, fit tant par ses prières, qu'elle parvint à adoucir son époux et à leur sauver la tête à tous les trois. Jean Lemercier fut seulement dépouillé de la meilleure partie de ses biens et exilé sur sa terre de Nouvion-le-Comte, avec défense de repasser l'Oise ou l'Aisne sous peine de la vie (Froissard, livre IV, chapitre 48). On lui rendit ses biens l'année suivante, à la condition qu'il viderait le royaume. Il avait été marié deux fois.

De sa première femme, Jeanne de Dompierre, il n'eut qu'une fille nommée Guillemette qui épousa Renaud de Coucy, seigneur de Vervins. Sa seconde femme, Jeanne de Vendôme, lui donna un fils, Charles qui hérita de ses domaines.

Charles Lemercier, seigneur de Neuville, Nouvion-le-Comte, Fontenai-en-Brie et Rugles, fut chambellan du roi et du duc de Bourgogne ; ses actions nous sont inconnues. Il mourut en 1414 ne laissant que deux filles de sa femme, Isabelle, la Marechalle, dame de corps de la reine. La premiere, nommée Jeanne, épousa Oger de Nantouillet et lui porta les terres de Neuville et de Nouvion-le-Comte , la seconde, Catherine, fut alliée à Jean de Couttes.

Oger de Nantouillet n'eut également de sa femme Jeanne Lemercier qu’une fille nommée Beatrix qui fut donnée en mariage à Jean III de Châtillon, seigneur de Troissy, Châtillon et la Ferté en Ponthieu.

Jean de Châtillon étant mort sans postérité, les terres de Nouvion et de Neuville revinrent à Jean de Gouttes du chef de sa femme, Catherine Lemercier. Mais il paraît étre mort lui-même sans enfants car ces biens entrèrent vers 1438 dans les mains d’Enguerrand de Coucy, seigneur de Vervins.

Enguerrand de Coucy-Vervins qui avait succédé dans le domaine de Neuville à sa mère Guillemette Lemercier en 1438 mourut en 1472 ne laissant qu'un fils, né Enguerrand, qui avait épousé Jeanne des Ursins, fille de Michel et d’Yolande de Montberm, et n'en eut pas d'enfants.

Nous ne savons, dit Melleville, si ces domaines restèrent longtemps dans la maison de Coucy-Vervins car il existe sur notre liste des seigneurs de Neuville une lacune qui s'étend de l’année 1438 jusqu'après le milieu du 16ème siècle. Nous trouvons seulement qu'à cette dernière époque, c'est-à-dire vers 1570, le domaine de Neuville était possédé par une branche cadette des Proisy, barons de la Bôve.

Voici ce que pense M. le colonel marquis de la Tour du Pin Chambly de la Charce de la lacune susdite :
“Neuville passa alors soit comme reprise de Jeanne, soit comme legs fait à elle par son mari, dans la maison des Ursins et y fut accueilli par son frère Charles, grand prieur d’Aquitaine, qui se qualifiait seigneur de Neuville en 1532 et y mourut en 1545 (voir archives d’Arrancy).

Le puîné de Louis, Jean, eût Neuville en partage et mourut sans postérité laissant la seigneurie à son filleul et neveu, Jean, fils de son frère François, grand bailli du Vermandois.

Jean II de Proisy mourut en 1677 à l’âge de 94 ans ; il avait épousé Guillemette d’Anglebermer de Laigny. Il en eût trois enfants : l’aîné Emmanuel-Joseph lui succéda dans la terre de Neuville : Claude, le second, assassiné en 1668 avant d’avoir contracté aucune alliance ; enfin, Nicole-Françoise qui porta la seigneurie à Louis-François de Hallencourt, comte de Drosmenil qu'elle épousa.

Emmanuel-Joseph de Proisy, seigneur de Neuville, Marfontaine, La Capelle et la Flamengrie mourut en 1743. Il avait épousé en 1678 Louise-Césarée de Conflans qui lui donna parait-il quatre enfants, savoir : Louis-César marquis de Drosmenil, après lui, mort sans postérité le 18 juillet ......,; Charles-Gabriel, seigneur de Neuville, Madeleine-Anne-Louise-Françoise, épouse d’Emmanuel-Joseph Hallencourt et Charlotte-Louise alliée à Charles de Brulart, marquis de Genlis. le Erulart, marquis de Genlis

Ces trois derniers moururent sans doute aussi sans enfants car nous voyons que la terre de Neuville était passée dès 1722 dans les mains de Louis-François de Hallencourt qui avait épousé, comme nous venons de le dire plus haut, leur tante Nicole-Françoise de Proisy (voir pierres tombales de l’Eglise de Neuville).

Nicole de Proisy était descendue dans la tombe en 1720, le 5 mai, et son mari, Louis-François de Hallencourt l’y suivit quatre ans après, n’ayant eu d’elle qu’un fils nommé Charles-François-Gabriel, le 29 février 1724.

Celui-ci contracta successivement deux alliances. Il épousa d'abord en 1739, Marie Jeanne Ballet de la Chenardière qui mourut trois après dans sa 28ème année, 1er janvier 1742 ; puis Marie-Edme de Boullogne, qui mourut en 1747, 9 février, dans un âge encore plus tendre que la précéctente, puisqu’elle n’avait que 24 ans. Elle lui laissa un fils et deux filles. Le fils nommé Jean-Gabriel-François vit s' éteindre en lui la descendance masculine de la famille de Hallencourt.

Il mourut très jeune vers 1765, et sans avoir, parait-il, contracté aucune alliance. De ses deux soeurs, l'une, Charlotte-Françoise épousa le marquis de Noailles, d'abord ambassadeur de France en Hollande, puis en Angleterre. L'autre, Adélaide Elisabeth fut alliée au marquis de Belzunce, colonel du régiment de ce nom ; elle mourut très jeune aussi, étant décédée en 1770, âgée de 21 ans à peine.

Après la mort de Jean-Gabriel-François de Hallencourt, la terre de Neuville passa d'abord par héritage dans la famille de Noailles, puis dans celle de Belzunce qui la possédait encore au moment où éclata la Révolution française. Elle portait alors le titre de marquisat et les villages de Chermizy, Jumigny, Oulches et Vassognes étaient de sa mouvance.

Voilà comment Neuville passa des Coucy aux des Ursins et de ceux-ci aux Proisy, ce que Melleville n'a pas aperçu comme il le déclare lui-mème.

Il indique bien dans son dictionnaire historique des communes du département de l'Aisne une date de 1445 comme étant celle de la seigneurie d'un certain Jean Jouvenel des Ursins, sire de Neuville.

Cette date est, en effet, celle de l'intronisation en siège episcopal de Laon d'un personnage de ce nom, depuis archevêque marquant de Reims. Il est

possible qu'il ait acheté à ce moment-là Neuville au sire de Coucy-Vervins. Mais il est plus probable que c'est par réversion comme il est dit ci-dessus, que cette mutation s'est faite.

Quoiqu'il en soit, le sort de la seigneurie de Neuville présente quatre phases intéressantes indépendamment des accidents de famille :

1- La seigneurie des Montchalons, période féodale,
2-Le Passage aux mains d'un puissant personnage de la Cour, Le Mercier, sous le règne des premiers Valois,
3-Puis d'une puissante famille parisienne, des Ursins
4-Le retour à l'élément chevaleresque, Proisy,
5-La fin de l'ancien régime avant les d'Hallencourt, Noailles, Belzunce.

Tout naturellement, Neuville avait son château d’habitation des seigneurs. C'était un château-fort bâti au bas de la colline. Il n’en rester plus que des ruines.
Son enceinte vaste et de forme irrégulière était fermée par d’épaisses et hautes murailles consolidées par de nombreux et épais contreforts rapprochés les uns des autres, 15- de ces énormes piliers restaient encore debout.

L’entrée était tournée vers l’est. Il se composait de cinq tours dont trois carrées et deux rondes. Une plus grosse que les autres s’élevait à une grande hauteur, vers l’ouest ; elle était destinée à protéger le château et on y avait aménagé des ouvertures à sa base pour y placer le canon. Il ne reste presque plus rien de ces tours, toutes sont tombées sous l’effort de la pioche et de la mine. Une d’entre elles cependant, présente une façade tournée vers le sud.

Les ouvertures de cette tour n’existent plus, de sorte qu'elle se trouve partagée en deux parties qui ont l'aspect de deux grandes tours distinctes.

La partie ouest montre aussi deux ouvertures pratiquées pour la défense. Bien que bâtie sur les dernières pentes de la colline, l'ancienne demeure des Seigneurs de Neuville avait pourtant son emplacement sur une éminence et dominait tout le pays d'alentour, sauf vers la montagne. C'est ce qui indique pourquoi les tours n'étaient percées qu'au rez-de-chaussée. Elles étaient toutes les cinq assises sur des bases d'une très grande solidité et construites en glacis jusqu'à la hauteur de trois à quatre mètres.

Il a fallu pour construire le château-fort de Neuville une énorme quantité de pierres, puisque le pays moderne a été en grande partie construit avec ses débris et que plus de 4.000 mètres de ses démolitions ont servi à la construction de routes. Elles avaient été extraites, d'après la tradition, des carrières de Chermizy et de Neuville. De Chermizy pour les pierres de taille et de Neuville pour les moellons destinés aux murs d'enceinte. La chaux pour le mortier qui a servi en grande quantité était préparée sur les lieux mêmes avec des pierres du pays. Deux fours à chaux étaient établis, l’un sur la carrière où l’on tirait la pierre, l'autre à 200 mètres au nord de l’enceinte du château. Son emplacement porte encore le nom de four à chaux des seigneurs. Les bois, pour cette construction, ont été tirés dans leurs domaines des Allemonts.

Une tuilerie avait été créee à 300 mètres du château au S.O. et c’est elle qui, certainement à fourni toutes les couvertures ; néanmoins, quelques restes d’ardoises fort épaisses ont été trouvées dans les décombres de cette forteresse.

L’intérieur du château renfermait plusieurs caves de différentes formes et dimensions. Les unes tournées vers le Sud, les autres vers l'Est et suivant probablement la direction des tours sous lesquelles elles se trouvaient. Elles étaient plus ou moins profondes. On y arrivait de divers endroits car les portes d’entrée présentent une disposition qui permet d'y avoir accès de plusieurs côtés. Des souterrains très étroits et où un homme pouvait à peine passer conduisaient à ces caves dont les portes d'entrée pouvaient à en point douter être dissimulées.

On a trouvé, il y a quelques années, un de ces souterrains ou couloir très étroit qui aboutissait à l'une de ces caves dont l'entrée fut trouvée il y une vingtaine d'années.

On suppose que c'est elle qui avait l'honneur de renfermer les vins des seigneurs et en cas d'attaque de recevoir les trésors. Ce devait être, en effet, une cachette fort difficile à découvrir et nous ne nous étonnons pas si le seigneur de Rieux lorsqu'il fit le siège du château de Neuville en 1593 ne trouve aucune des richessses qu’il convoitait.

Sur cette cave s'élevait la tour faisant face au plein soleil et dont il reste les deux pans de mur très élevès dont nous avons parlé. Elle devait être la résidence favorite et habituelle des châtelains car c’était le lieu qui présentait un séjour des plus agréables.

Au-dessous était l'orangerie, belle voûte haute et spacieuse où un cultivateur renferme actuellement ses instruments de labour et qu'on désigne encore de ce nom ; à gauche, s'étendait une grande serre qui conserve également sa dénomination et où l'on aperçoit aussi les arcades de l’ancienne voûture. Devant se trouvaient les jardins au bout desquels prenaient naissance les allées de charmes conduisant au vivier d'une vaste étendue et alimenté par l'Ailette. C'était là, d'après la légende, que les serfs venaient battre l'eau pour faire cesser les coassements des grenouilles qui troublaient le repos des seigneurs.

Au bas de la tour se trouvait la barrière que nul n'avait le droit de franchir : il fallait tourner l'enceinte du château pour passer : c'est ce qu’on appelait faire le tour de ville, expression que les habitants empIoient encore aujourd'hui lorsqu'ils veulent parler du chemin qui se trouve derrière le village et qu'on nomme chemin de ville.

A 30 mètres de l'orangerie et de la serre, en contre-bas, existe, bien conservé, un mur en hémicycle appelé le fer à cheval et au centre duquel s'enfonce une voûte à arcades peu profonde dont l'entrée est formée par trois ouvertures en plein cintre, ornées de chapiteaux surmontés d'une corniche. Au-dessus de l'ouverture centrale apparaît un double écusson rendu méconnaissable par le marteau des briseurs d'images. On ne sait à quel usage était destiné cette construction ; mais comme elle était située juste en haut de la principale allée qui descendait à l'étang, peut-être servait-elle à remiser les engins de pêche ou les instruments de jardinage.

Plus bas, à gauche, on voyait, il y a moins de trente ans, d'autres voûtes remplies d'eau de source qu'on appelait les réservoirs. Elles ont été bouchées par les possesseurs des terrains qui ne pouvaient les utiliser.

Comme juridiction seigneuriale, les anciens seigneurs de Neuville avaient le droit de haute et basse justice. Des oubliettes que l'on a découvertes il y a peu d'années le constatent. Ce cachot, de forme ronde ogivale, que le temps n'a pas encore détérioré, est placé derrière un mur de plusieur mètres d'épaisseur du fond de la serre. Il se trouvait sous une tour et c'est lors de sa démolition complète qu'il a été mis à jour. A n'en pas douter, des victimes ont été jetées là puisqu'on y a trouvé des ossements. Les propriétaires de cette partie de l'ancien château ont percé dans le mur une porte et font de la lugubre prison, une cave. Telle est l'idée des habitants au pays tandis que les visiteurs n'en croient rien

Il existait des caves au dehors de l'enceinte de la forteresse qui devaient correspondre à celle de l'intérieur.

Dans ces dernières, dont l'existence n'a été connue que lors de la construction de la route n° 63, on a également trouvé des ossements humains, notamment des ossements d'enfants renfermés dans de grands vases de terre et de grès. Nous regrettons que les ouvriers n'aient tenu aucun compte de ces découvertes et aient brisé les vases. Des anneaux scellés dans les parois des murs étaient encore munis de leur chaine et de leur crochet. Ces caves pouvaient bien être la prison souterraine du chateau.

Le château de Neuville a subi plusieurs sièges, le plus important comme aussi le plus désastreux a été celui de 1593 par les ligueurs, sous la conduite de leur chef de Rieux, raconté par Melleville.

Nous transcrivons le récit qu'en a fait l'historien contemporain A. Richard :

"Le lendemain XXIII° jour du mois de may 1593, suivant la prière que les signalez ligueurs de Laon feirent à de Rieux, on alla investir le chasteau de Neuville, espérant par les chefs de l’entreprise d’y faire bien leur profit aux meubles et predeulx joiaulx mis en dépost dedans ceste place par plusieurs gentilznommes du pais et ce à ces fins ont fest sortir hors de Laon les deux grosses pièces ramenez du chasteau d’Aippes ; mais sur l’advis certain receu par de Rieux, que bon nombre d’ennemis estaient en compaigne pour l’aller visiter à ce siège, il fait rentrer le canon dans la ville Jasor et les advancez mandez au retour jusque à une aultrefois qui fut au mois de febvrier de l’année ........... par l'arrivée en ce pais du comte Charles et aultres chefs et cappitaines jusques au nombre d’environ 3 ou 4.000 hommes desquels de Rieux obtint quelques compaignies par la faveur du colonel la Bourlotte pour retourner à son entreprise où il prétendait bien faire son proffict sur l'opinion qu'il avait que dans ce chasteau de Neuville, il s'estait mis en dépost de grandes richesses par des gentizhommes ; et en cette opinion il fit traîner le canon devant ce chasteau ou pour lors estait dedans le Seigneur ou lieu, quelques réfugiez et villageois qui furent sommés de se remettre à la volonté de de Rieux.

Le Seigneur en feit refus alleguan pour ses raisons qu'il n'avait faict et ne faisait la guerre à personne, qu'en considération de son vieil aage Monsieur le duc de Mayne et le Maréchal de Rome lui avaient cy devant fait expédier leurs sauvegardes, que le gouverneur de Rieux ne le pouvait ignorer pour lui avoir été nottifié. Ces raisons rapporté par le trompette, ne le peurent divertir que le seizième jour de ce mois de febvrier il ne feit bracquer le canon devant le chasteaut et le battre assez furieusement.

Les assiégés se voians sans gens de guerre ni munitions suffisans pour la deffense de la place, la basse cour jà gaignée à la perte de 8 à 10 soldats des assiégeants et la sappe advancée à quelques endroits demandèrent à parlementer pour recepvoir quelque honneste composition faisant laquelle ils ne peurent aultre chose obtenir que de se soubzmettre à la volonté de de Rieux lequel aussitôt la parolle donnée voullut lui mesme entrer dedans, où ayant faict perquisition et recherche il ne trouva ce qu'il estimait ; de quoi il fut extresmement fachez et de collère en sortant dict qu'il feraict pendre tous les tenans pour avoir enduré le canon et comme il estait à la première grande porte il receut une lettre de la part d’un mutin de ceste ville de Laon qui lui enflamma davantage sa collère, en ce que par réelle ce mutin (contre vérité) lui mandait qu'aulcun des siens de sa garnison de Pierrefond avaient esté for mal traitez par ceulx du party contraire, qu'à leur invitation et pour repousser leur cruauté le conseil de la ville lui baillait advis d'en faire pendre quelzques ungs de ce chateau.

Signaument un nommé Nicolas Gaultier procureur à Laon (suivent les détails de l'exécution de Gaultier et de sept à huit autres)... en la collere ou il estait, sans prendre aucun advis, commanda que tous les tenans de ce chasteau fussent pendus et étranglez ; toutefois sur remontrance qui lui fut faict que telle exécution tournerait à grande conséquence que d'ailleurs on pourrait tirer grande ransson d'aucun d'eulx, le seigneur de Neufville, Claude Griffon seigneur d’Aubencourt et Jehan Martin receveur des consignations du baillage de Laon furent tirez à part sur l'offre ils faisaient de paier bonne ransson. Ung quidam du bourg de Corbeny de la religion protestante (recongneue tel à la sortie de la place par quelzques relligieux de l'abbaie de Vauclercq et aultres gens d'église et délivré à ces dévotz relligieux scelon leur requeste pour en faire un sacrifice sanglant, comme tost ils feirent soubz prétexte de l'aller mener en lieu de seureté pour sa ransson, cruaulté qu’eux mesmes récitèrent à leurs compaignons au retour de ce sacrifice inhumain ......... Sept aultres de ce chasteau suivirent de Rieux pour recepvoir la mort aux branches d’un gros pommier peu en dessoulz du chasteau, ou les six qui estaient habitants de Grandelain, Bray, courtecon et Chermizy, villaiges voisins, furent attachéz. (1)

Après la prise du chasteau de Neuville, Monsieur le duc du Mayne ordonna quarante soldats pour la garde de la place, paiez par la ville de Laon.

Cette compagnie y fut quelque temps , mals faulte de paie, une partie s'évanouit et craignant par le conseil de la ville que si ce chasteau estait repris par les ennemis, ils n'en fussent maltraitez, il fut advisé en une assemblée particullière tenue le 8 apvril d'escripre comme il fut au dict sieur duc qu’il estait impossible d’entretenir la garnison de ce chasteau des deniers des tailles, d’aultant qu’il fallait 23 mil livres pour entretenir celle de Laon.

Après la prise de Crespy et en attendant la venue du duc de Parme, le mareschal de Rome entreprit de enlever le chasteau de Neuville et le fort de Pont Arcy comme estant contraires à la ligue et pour y s'acheminer comme il feit le 28 de ce moy, il print une partie de l'armée de Monseigneur le duc de Magne ; de ce voyage le sieur de Neufville en fut adverti qui employa les amis qu'il avait à ceste armée pour rompre ce desseing pour son regard avec plusieurs remontrances qui estaient considérables ; finalement il fut exempt la nuée moyennant 400 escus qu'il paia au mareschal de Rome pour ses fraiz et pour l'advenir tira une sauvegarde tant du dit sieur duc que du mareschal.

(A. Richard, La ligue dans le Laonnois, P. 288).

Comme nous l'avons vu, ces lettres de sauvegarde que possédait le Seigneur de Neuville, Louis de Proisy, n'ont pas empêché le fougueux et cruel ligueur de Rieux de s'emparer de son château et de pendre un grand nombre de ceux qui le défendaient,

(1) Parmi les six ou huit paysans qui furent rendus par les ordres de de Rieux aux branches des pommiers du jardin, se trouvait un jeune homme originaire de l'un des villages environnants. Sa mère inquiète de sa longue absence le cherchait partout, elle arriva à Neuville au moment même ou la garnison venait de se rendre. On lui apprend que l'exécuteur est en train de suspendre les prisonniers aux arbres du parc. Elle y vole et reconnait son fils parmi eux. Aussitôt, elle se jette aux pieds du bourreau et le supplie, les larmes aux yeux, de lui permettre de détacher son enfant. Mais cet homme, insensible à la pitié, la repousse durement.

A ce moment même une troupe de ligueurs entre dans le verger. Cette femme court à eux, invoque à grands cris leur commisération, se roule à leurs pieds. Qui pourrait être insensible au désespoir d'une mère ? Ces hommes, qui peu d'instant auparavant, ne respiraient que la soif du carnage, s'attendrissent, s'émeuvent au spectacle d'une si profonde douleur. La pauvre mère s'en aperçoit rappelant aussitôt son courage elle s'élance sur l’échelle sans se laisser intimider par la présence du bourreau qui, cette fois n'ose plus s'opposer à son action. En un clin d'oeil, la corde est coupée et le jeune homme est rendu à la vie. L'un et l'autre s'éloignèrent bientôt en comblant de bénédictions leurs libérateurs.

Seigneurs de Neuville relevant de la châtellenie de Montaigu

1115 - Wiard ou Guyard, seigneur de Neuville de la famille de Pierrefont.
Fe : Beatrix
Enfants : Henri, mort jeune, Hellin, Guyard, Anselme

1145 - Hellin, seigneur de Neuville.

1154 - Guyard II, de Neuville, son frère.
Fe : Lucie
Enfants : Simon, Vauthier ou Gauthier, Payen, Nicolas, Baba, Mélissende, femme de Payen seigneur de Montchâlons ; Asceline, femme du seigneur de Dormans ; Mathilde alliée à Bernard seigneur d’Autremencourt.

1160 - Simon, seigneur de Neuville. Fe : Béliarde. sans enfants.

1180 - Simon de Montchâlons, seigneur du dit par son mariage, parait-il, avec la veuve du précédent.

1196 - Alain dit de Roucy, seigneur de Neuville ;
fils puiné d'hugues, seigneur de Pierrepont
Alain, Baudoin, seigneur de Gueux.
Pierre, seigneur de Mauricus.

1220 - Alain II dit de Roucy, seigneur de Neuville. Femme Eustachie Enfants : Pierre, Alain, Gauthier chanoine de Reims
1244 - Pierre, seigneur de Neuville. Il se joignit à Saint Louis dans la croisade de1248.
Femme : Adélaide de Heaumetz. Enfant : Alain mort jeune

1260 - Alain III, frère du précédent, seigneur de Neuville.
Femme Eustachie.

vers 1270 - Pierre II, seigneur de Neuville.

1277- Pierre III, seigneur du dit, son fils.

1297- Alix, dame de Neuville.

1344 - Henri, seigneur du dit.

1356 - Jean Chevalier, seigneur de Neuville

1370 - Jean Lemercier, seigneur de Neuville et Nouvion-le-Comte, ministre des rois Charles V et Charles VI.
Femmes :
- 1° Jeanne de Dampierre, dont Guillemette, femme de Renaud de Coucy, seigneur de Vervins
- 2° Jeanne de Vendôme, dont :

1356- Charles Lemercier, seigneur de Neuville et Nouvion-le- Comte, Fontenai-en-Brie et Rugles, chambellan du roi.
Femme : Isabelle la Maréchale, dont deux filles.

1414 - Oger de Nantouillet, seigneur de Nouvion-le-Comte et de Neuville par sa femme, Jeanne, fille des précédents.
Enfant Béatrix, qui porta ces donnaines à :
14... Jean de Chatillon, seigneur de Troissy, Châtillon et la Ferté-en-Ponthieu.
sans enfants. Neuville revint à :
14... Jean de Crouttes qui avait épousé Catherine, seconde fille de Charles Lemercier.

1438 - Enguerrand de Coucy, seigneur de Vervins et de Neuville par sa mère, Guillemette Lemercier

1445 - Jean Juvénal des Ursins, seigneur de La Chapelle, de Doul et de Neuville.

1487- Charles des Ursins seigneur de Neuville et d’Arrancy en partie 1545. Sa nièce Yolande épousa le sieur d’Espence et en eut une fille, Claude, qui porta sans doute le domaine de Neuville, par son mariage avec Louis de Proisy, dans la famille de Proisy qui possédait déjà la terre de la Bôve. Elle devint l'apanage d'un puiné dans le suivant.

1628 - Jean de Proisy, fils de Louis I susdit.
Femmes :
1° Sébastienne de la Forge
2° Guillemette d'Anglebermer
Enfants : Emmanuel-Joseph, Claude tué en 1668, Nicole-Françoise, femme de Louis-François de Hallencourt, comte de Dromesnil, vers 1600, Emmanuel-Josepth de Proisy, seigneur du dit La Capelle, etc.... femme : Louise-Césarie de Conflans ; enfants : Louis-César marquis de Dromesnil, Charles-Gabriel, Madeleine, femme d'Emmanuel-Josepth de Hallencourt, Charlotte mariée à Charles de Brulart marquis de Genlis.

vers 1700 - Charles-Gabriel de Proisy, seigneur du dit. Sans enfants sans doute.

1722- Louis-François de Hallencourt, comte de Drosmesnil, seigneur de Neuville par Sa femme, Nicole-Françoise de Proisy ci-dessus.
Enfants :
Charles-François ; N... éveque d’Autun en 1709-1724
Charles-François-Gabriel de Hallencourt, seigneur de Neuville.

Femmes :
1° Marie-Jeanne Ballet de la Chenardière,
2° Marie-Edme de Boullogne.
Enfant : Jean-Gabriel-François, mort jeune en I765.

La terre de Neuville passa ensuite par héritage dans la famille de Noailles. Puis dans celle de Belzunce qui la possédait encore au moment de la Révolution.

Famille Le Mercier, seigneur de Chailvet et Saint-Julien (Royaucourt), Neuville-en-Laonnois, Nouvion-le-Comte, Royaucourt, Vaudesson.

Famille de Nantouillet, seigneur de Neuville, Nouvion-le-Comte et Ognes.

Famille de Crouttes, seigneur de Neuville et Nouvion-le-Comte.

Famille de Proisy, seigneur d'Aubigny, Autremencourt, Bouconville, la Bôve, La Capelle, Chermizy, Eppes, La Flamengrie, Jumigny, Liesse, Liez, Malzy, Marchais, Marfontaine, Marigny-en-Orxois, Mauregny-en-Haye, Montceau-sur-Oise, Neuville-en-Laonnois, La Flenoye (Englancourt, Proisy, Rogny, Rougeries, Sissy, Le Sourd, Touvent (Ployart), La Vicomté (Ployart), Vezilly.

Armes : de sable à trois lions d’argent armés et lampassés de gueules.

Famille de Hallencourt, seigneur de Chermizy, Jumigny, Neuville-en-Laonnois.

Armes : d'argent à la bande de sable, cotoyée de deux cotices de même.

Famille de Belzunce, seigneur de Chermizy, Jumigny, Neuville-en-Laonnois, Vau seine (Ployart).

Armes : aux 1er et 4ème de Béarn ; aux 2ème et 5ème d'argent, à une hydre de simple à sept têtes, dont l’une est coupée et tenant encore un peu au cou, avec quelques gouttes de sang coulant de la blessure.

Personnes du château de Neuville relatées dans les archives.

1656 - Françoise-Nicolle de Proisy (marraine),

1656 - Salomée de Gondrelier (marraine),

1656 - Claude de Proisy et Françoise de Proisy (frère et soeur) (parrain et marraine),

1656 -(baptème) Catherine Depimor, née le 1er décembre I656, fille de Charles Depimor, garde du Roy et Antoinette Descartes. Parrain et marraine : Jean Depimor et Cattierine de Beaufort.

1660 - Claude de Proisy a été tué le 2.9.1668 et inhumé dans la chapelle sainte Catherine fondée par les seigneurs de Neuville, fils de Jean de Proisy.

1672 - (décès) Paul Dépimor, fils de Charles Dépimor, garde du roi et Antoinette Descarte (16.5.1672).

1674 - (baptême) Charles-François d’Hallencourt et de Nicolle-Françoise de Proisy. Parrain et marraine : Charles le Danois de Fussigny et Guillemette Danglebermer, épouse de Jean de Proisy.

1675 - (décès) Jacqueline de Proisy (19.12.1675). Témoins : Charles Dépimor (neveu) et Antoinette Descartes (nièce).

1675 - Claude Dépimor (parrain), fils de Charles Dépimor.

1677 - décès de Jean de Proisy (16.2.1677) Témoins : Emmanuel de Proisy (fils) et Louis-François d'Hallencourt (gendre).

1677 - Louise Dépimor (marraine le 22.4.1677).

1677 - (baptême) Emmanuel-Joseph Raflon, fils d'Innocent Raflon et de Marie Pasteur (27.12.1677) ; Emmanuel-Joseph d'Hallencourt (parrain) et Delle Charlotte de Chambly (marraine).

1683 - Charles-François d’Hallencourt et Eléonore Démorets (parrain, marraine le 30.9.1683)

1683 - mariage. Valérien de Crécy (de Pargnan) seigneur, fils de François de Crécy et de Elisabeth Dédouville et de delle Catherine Dépimor, fille de Charles Dépimor, garde du roy et de Antoinette Décartes. Témoins : Pierre de Crécy (oncle), François de Crécy et Jérome Dédouville (signé Debedouville).

1684 -(décès) Dame Guillemette Danglebermer, veuve de Jean de Proisy (16.2.1684). Témoins : Louis-François d’Hallencourt (gendre) et dame Nicole-Françoise de Proisy (fille).

1696 - (mariage) Charles Roger, fils de Adrien Roger et de Nicole Bourgeois (de Cerny), et Madeleine Boulie et de Catherine Duménil (13.2.1696). Témoins : Noél Marchand, curé de Cerny et Claude François Dépimor, garde du roy.

I699 - (baptème) Nicole Catherine Roger, fille de Charles Roger et de Madeleine Boulie (9.2.1699). Parrain-marraine Claude François Dépimor (seigneur de Sainte-Claire), garde du roy et de Madeleine Roger.

1704 - (décès) Antoinette Décartes, veuve de Charles Dépimor, marquis de Sainte-Claire (10.11.1704).

1707 - (décès) François Louis d’Hallencourt, capitaine de dragons au régiment de Vaise.

1720 - (décès) Nicolle Françoise de Proisy (10.11.1720) épouse de M. le comte de Drosménil (5.5.1720).

1724 - (décès) Louis François d’Hallencourt, comte de Droménil (29.2.1724).

1742 - (décès) Marie-Jeanne Ballet de la Chenardière (1.1.1742), première femme de Charles-Gabriel-François d'Hallencourt.

1743 - (décès) Emmanuel Joseph d’Hallencourt, marquis de Droménil (12.3.1745), fils Louis-François d’Hallencourt.

année inconnue. (décès) Louis-César-François d’Hallencourt, fils de Emmanuel-François d’Hallencourt (8 juillet).

1747 - (décès) Jeanne Edme de Boullogne (19.2.1747), deuxième femme de Charles-Gabriel-François d’Hallencourt.

1760 - (décès) Etienne le Bée de Bellicourt.

1763 - M. Truy, régisseur des biens de Neuville, époux de Françoise de Beaufort.

1766 - (baptème) Louise-Charlotte Drot, fille de Charles Drot, jardinier du château. Parrain : Louis-Emmanuel, marquis de Noailles, gouverneur de Vannes, seigneur de Neuville, et la marraine, Charlotte-Françoise d'Haliencourt de Dromesnil. Signatures : Le Mis de Noailles, d’Hallencourt de Noailles, Le Paire de la Bôve, Le Baron de Proisy de la Bôve.

1768 - Mme Adelaïde Elisabeth de Noailles de Belzunce.

1770 - Mauduit, président au grenier à sel de Cormicy, régisseur du château de Neuville.

Neuville possède une église datant du 12ème siècle. Il est probable qu'elle a été construite en 1154 en même temps que le prieuré Saint-Julien, tous deux établis dans l’intérieur du château. Elle fut consacrée en 1178 par Roger de Rosoy, évéque de Laon, sous le vocable de Saint-Julien qui tombe le 28 août et dont les habitants célèbrent la fête le dimancne qui suit cette date.

La longueur de l'Eglise est de 23 mètres et sa largeur de 12 mètres intérieurement. Primitivement, elle avait la forme d'une croix régulière ; la disposition de ses deux chapelles latérales d'une symétrie parfaite et mesurant 3 mètres sur 3 mètres.

Quelques siècles plus tard, une autre chapelle appelée Sainte Catherine fut bâtie par les premiers membres de la famille de Proisy et forme le prolongement de celle de Saint Julien vers le sud. Au fond, on voit un autel en forme de tombeau orné de chaque côté de chapiteaux et à sa base de trois écussons séparés par des colonnettes. Ce monument exécuté dans le goût du 16ème siècle est d'un travail remarquable. Il est rempli de dessins finement sculptés et fait l’admiration des visiteurs. Malheureusement, le marteau des démolisseurs a passé là et a rendu méconnaissable les statues et les attributs des seigneurs qui ont été inhumés en ce lieu

Ce qui nous donne à croire que ce monument qui sert actuellement d'autel n'était qu'un tombeau qui servait de sépulture aux membres de la famille des Ursins, puis de Proisy, c'est qu'un acte de décès que nous transcrivons ci-dessous ne laisse subsister aucun doute sur l'usage réservé à la chapelle des Seigneurs.

Voici cet acte que nous avons trouvé au registre de l'année 1668 :

“Le deuxième de septembre a esté tué Claude de Proisy, fils de Messire Jean de Proisy seigneur de Neufville et il estait aagé de trente ans. Son corps fut inhumé le lendemain dans la chapelle de Sainte Catherine fondée par les seigneurs de Neufville.

Le Deuil estoit si grand de toute la famille ie nay pas jugé à propos de faire signer. (1)

Les statues dont les débris ont été jetés de tous cotés ajoutaient encore à l'ornementation du tombeau qui est d’un travail accompli. Au-dessus du tombeau se trouvait une croisée en ogive, en partie bouchée. Sa largeur correspondait exactement à la base, tombaient sur les coins extérieurs des chapiteaux qui étaient surmontés d’une corniche sculptée comme le reste.

La chapelle entière était ornée de peintures murales. Celles qui ont échappé au badigeon et qui recouvrent encore le plafond sont magnifiques et attirent forcément les regards, elles sont souvent visitées par des étrangers.

Ces peintures étaient parsemées d'écussons et d'images, mais on ne voit plus de ces écussons et de ces images que les ornements extérieurs, le reste ayant été également recouvert d'une peinture à la chaux.

Une autre chapelle du même style que celle des seigneurs, mais très petite et peu élevée est percée au couchant de cette dernière ; elle était également comme elle décorée de peintures admirables. Elle est munie de trois petites fenêtres, également ogivales dont deux prennent jour au sud et à l'ouest, la troisième donne vue dans l’intérieur de l'église. Ce petit édifice qui renferme aujourd'hui la cuve baptismale avait été élevé sans doute comme lieu où se rendaient les seigneurs pour prier.

Ils avaient entrée par une porte communiquant avec la tour longeant la barrière ; car, comme nous l'avons dit, l'église de Neuville était dans l’enceinte même au château. Les seigneurs de Neuville, ainsi que leurs épouses qui sont décédés en leur château depuis le 16ème siècle ont eu leurs sépultures dans l’église.

Nous avons lu plusieurs actes de décès qui en témoignent et on voit encore plusieurs pierres tombales qui ne laissent subsister aucun doute à cet égard, mais presque toutes sont usées et les inscriptions indéchiffrables. Celles surtout de dates anciennes.

Les derniers membres de la famille de Proisy et d'Hallencourt sont inhumés dans le choeur de l'église d'après leur volonté formelle relatée dans leur testament et même dans l'acte de décès.

Leurs tombes sont recouvertes par quatre grandes pierres bleues d’ égales dimensions et placées les unes contre les autres, formant un rectangle parfait de 8 m2 50. Elles portent toutes quatre des épitaphes. Sur celle de Jean de Proisy, à gauche, on lit cette inscription tracée en belles lettres parfaitement gravées :

"Cy, gist haut et puissant seigneur messire Jean de Proisy, chevalier, seigneur de Neuville, Chermizy, Jumigny, Vassogne, Ouche, Marfontaine,

Longery, Bugny, Roubais, par indivis avec Messieurs les abbés et relligieux de Saint-Denis en France ; et de la Capelle par indivis avec le roy, décédé le 16 février 1677, à l’aage de 91 ans.

Priez Dieu pour son âme".

Sur celle de son épouse, au-dessous :

“Cy gist haute et puissante dame Guillemette d’Anglebermer de Laigny, épouse de Messire Jean de Proisy, décédée le 13 février 1654.

Priez Dieu pour son âme”

Les tombes des d’Hallencourt et de sa femme, placées à droite des premières, ont les inscriptions suivantes :

“Cy gist haut et puissant seigneur Messire Louis-François d’Hallencourt, chevalier, comte de Dromesnil, seigneur dudit lieu de Neuville, Chermizy, Jumigny, Vassognes, Ouches, de Candeville, Herchies et Cordonnette de la Châstellerie et Vicomte de Translay, né le 1er février 1642, décédé le 28 février I724.

Priez Dieu pour le repos de son âme”

Vient au-dessous celle de son épouse :

“Cy gist haute et puissante dame Nicole Françoise de Proisy, fille de Messire Jean de Proisy et de dame Guillemette d'Anglebermer, épouse de Messire François de Hallencourt, comte de Drosménil, décédée le 5 mai 1720.

Priez Dieu pour son âme

Après avoir lu ces inscriptions, on se demande s'il n'y aurait pas aussi quelques curiosités à voir dans le cimetière.

Le cimetière de Neuville placé à l'extrémité ouest du village ne date que du 17 septembre 1733. Le transfert de l'ancien dans ce lieu s'accomplit par échange fait entre le seigneur d’Hallencourt et le curé Mobillon.

A cette époque, ce champ de repos se trouvait derrière le jardin du prieuré et tenait aux communs du château. Cette proximité gênant le seigneur ou lui déplaisant, il fit alors l'échange que nous avons trouvé aux archives et que nous transcrivons

“Le 17 septembre 1733, Monsieur Emmanuel Joseph d’Hallencourt, marquis de Droménil, seigneur de Neuville, d'une part, et moy Jean-Baptiste Mobillon, curé de Neuville, d’autre part nous avons fait sans formalité de justice et de bonne foy les échanges suivants :

1° La communauté abandonne au dit Seigneur l'ancien cimetière contenant 24 verges situé près de l'Eglise tenant au derrière des écuries du Château au levant, du couchant à la rue du midy au jardin du prieuré et du nord au chemin, le tout entouré de murs.

2° Une pièce de terre lieu-dit au Bois Jacques Chenu contenant pour le présent 56 verges 3/4 quoy qu'elle en doive contenir 64 verges conformément au testament d'Elisabeth Potelet tenant du midy au Seigneur, du nord au même, du levant à François Cuvilliers et à Nicolas Chevalier, du couchant au Seigneur.

3° Une pièce de terre lieu-dit Sous les Creuttes contenant 12 verges 1/2.

4° Une pièce de terre lieu-dit Les hautes Barres contenant 18 verges.

En contre échange desquelles terres et cimetière le Seigneur rend à la Fabrique :

1° Un nouveau cimetière fermé de murailles contenant 6 verges.

2° Une pièce de terre lieu-dit au Bois Jacques Chenu contenant 50 verges 1/2.
3° 60 verges 3/4 de terre lieu-dit aux Fortes-Terres auprès d’une pièce de terre appartenant à l'Eglise, contenant 50 verges au moyen de quoy l'Eglise possède à présent dans ce dit lieu une pièce de terre qui contient en tout 110 verges 3/4. Aucune signature à la suite de ces conditions.

Au centre du cimetière actuel s'élève une croix dont la translation a également été faite en 1733.

Elle se compose d'un petit monument en pierre dure du pays avec piédestal surmonté d'une colonnette au bas de laquelle et faisant corps se trouve agenouillée une Madeleine en prières. Cet ouvrage d'architecture et de sculpture de proportion peu étendue me paraît présenter à première vue rien de bien remarquable.

Cependant, cette statuette que le temps a mutilée était, au dire d'un connaisseur, une oeuvre faite de main de maître.

Sur la principale façade du piédestal on voit, en caractères gravés en creux dans la pierre cette inscription :

“Marie-Madeleine de Terron m'a fait faire l'an du Seigneur
1 82 “ (chiffres illisibles)
Elle demande à présent un "Ave Maria" et un "De Profondis" après son décès.

Melleville dit dans son Dictionnaire historique du département de l'Aisne que le village de Neuville possédait jadis une maladrerie dont les revenus s’élevaient à deux cents livres en 1648.

Nous n’avons pu recueillir aucune légende sur cette maison de lépreux qui a réellement existé mais nous avons constaté qu'elle était établie à environ 1.500 mètres au S.E. du village, dans le marais, appelé les Essillons, tout près le cours d'eau l’Ailette". Il en reste quelques vestiges.

Des fondations de murs se montrent encore lorsqu’on y creuse des fossés, des fragments de vases en terre, une pierre ayant servi d'évier, une margelle de puits, un seuil de porte, ont été découverts récemment. On y a trouvé aussi de petites pièces de monnaie de Louis XIII et d’Henri VI ; quelques unes sont déposées au musée de l'école.

Cette maladrerie qui occupait un assez grand emplacement a dut étre détruite par un incendie car tout cet espace de terrain présente une terre noire mélangée de petits morceaux de tuiles et pierres calcinées. Elle se trouvait à egale distance des trois communes de Neuville, Ailles et Chermizy, ce qui fait croire que les malades de ces villages y étaient indistinctement admis.

(1) La tradition rapporte qu'un seigneur de Neuville fut tué en duel par un seigneur de la Bôve au chemin de Chermizy à Ployart au lieu qui sépare les deux communes. Le motif futile du duel aurait été un lièvre tiré par l’un d'eux sur le domaine de l'autre. Melleville dit que Claude, second fils de Louis de Proisy fut assassiné en 1668, et nous pensons comme lui qu'il n'y a pas eu de duel proprement dit, mais que l'un des deux chasseurs dans la chaude discussion qu'ils eurent pour la possession du gibier a tué l'autre avec le fusil qu'il tenait. Il fut élevé sur l'emplacement du drame une croix qui subsiste toujours pour en perpétuer le souvenir.

Post Scriptum

En écrivant ma notice sur Neuville, je me suis obligé à reproduire toutes les légendes et opinions qui s'attachaient à ce sujet, mais croyez bien, chers lecteurs, que je n'ai entendu nullement pour cela les garantir et en prendre ainsi la responsabilité. Ainsi, pour n’en donner qu'un exemple, celles des oubliettes garnies de squelettes des victimes dont elles auraient été le tombeau et toutes celles qui s'attachent à toutes les habitations de l’époque féodale et notamment aux couvents, alors que le fait doit être interprêté d'une manière beaucoup moins dramatique mais beaucoup plus juste pour nos ancêtres, à savoir qu'il s'agit de lieux de sépulture que leur piété leur faisait rechercher.

Il faut probablement aussi classer dans les imputations dictées par la passion politique, les récits tirés des mémoires d'un bourgeois pendant la Ligue. C'est de tout cela qu'est composée la légende révolutionnaire dont la critique a commencé à faire justice.

Il reste par contre se petits faits constatés plus duement mais encore inexpliqués, tels que par exemple la trouvaille faite

1° d’une petite plaque de fonte de cheminée qui va être étudiée

2° d’une énorme pierre mesurant 1,30 m de haut, 1 m de large sur 0,12 m d’épaisseur aux armes de la famille de Villerey qui appartenait au Lyonnais

3° Celle du sceau de Guillaume d'Eppes, chanoine de l'Eglise de Liesse.

Ces pièces sont actuellement au château d'Arrancy.

Receveurs percepteurs des droits seigneuriaux

1686 -Jacques Rozelet, receveur et collecteur du sel,

1737 - Cosne-Joseph Mercier, receveur et collecteur du sel,

1754 - Charles-Philippe, receveur, régisseur des terres de Melle Dromesnil d’Hallencourt,

1772 - Antoine Legros, conseiller du roy, président du grenier à sel de Cormicy, receveur régisseur de la terre et seigneurie de Neuville.